Écrire, jouer et dessiner la recherche. Coconstruction et diffusion des savoirs par et vers le terrain

  • Write, play and draw research. Co-construction and dissemination of knowledge by and to the field

Résumés

Cet article analyse des supports de production et de diffusion des savoirs du collectif d’artistes-chercheuses-habitantes du projet de recherche-action gennevillois « La ville côté femmes » (2014-2020) : journaux de terrain, ateliers d’écriture, mises en scène de pièces de théâtre, et enfin, carte sensible et carnet de voyage. Il s’agit de montrer combien et comment le caractère alternatif de ces publications scientifiques influence le savoir produit lui-même, sa diffusion et sa réception, dans la sphère académique comme dans la société civile et politique. Plus globalement, l’article discute la capacité de ces formats à participer à l’empowerment (l'autonomisation)de l’ensemble des membres du projet, ainsi qu’à une certaine forme d’éducation populaire.

This article examines the ways in which knowledge is both produced and disseminated out of a collective research group involving artists, researchers, and residents, in the framework of a research action project in Gennevilliers, La ville côté femmes (2014-2020). Field diaries, writing workshops, performances, sensitive map and travel diary have been analyzed. The article aims to demonstrate the impact of the alternative nature of these scientific publications on the resulting knowledge. The author further argues that these alternative formats can contribute to the empowerment of all members of this project, as well as to community education.

Plan

Texte

De 2014 à 2020, à Gennevilliers (92), une recherche-action participative portant sur la place des femmes dans l’espace public a été menée par l’association Les Urbain.e.s1 adossée à un collectif de chercheurs et chercheuses en géographie, sociologie, urbanisme, architecture et sciences politiques et d’habitantes de la commune. Cette recherche-action, menée avec le soutien financier et logistique de la municipalité, visait à travailler avec mais aussi pour la ville. Ce projet a ainsi impliqué la coconstruction d’un savoir ancré et opérationnel.

L’entrée principale du projet – les rapports entre genre et ville – a été appréhendée au travers de différents axes qui ont émergé tout au long du projet. Ainsi ont été analysés : les expériences sensorielles de la ville, le rôle de la mémoire dans les rapports à l’espace, les mobilités pédestre et cyclable, la ville la nuit, ou bien des espaces particuliers comme les jardins partagés.

Bien qu’ils aient été (plus ou moins) bousculés tout au long du programme, plusieurs principes ont été établis. Le choix de la forme de recherche-action participative implique de reconnaître l’expertise d’usage des habitant·es afin de produire un savoir commun2. Son format s’inspire largement du dispositif « complices » de la Compagnie Acte dirigée par Annick Charlot. Pour chacune de ses créations, cette compagnie des arts de la rue recrute et mobilise une communauté de « complices » sur laquelle elle peut s’appuyer à la fois pour la construction de la pièce, et pour amplifier la popularité du spectacle (et donc attirer un public plus nombreux). À Gennevilliers, le projet s’est transformé, a pu évoluer de façon partagée. Ce partage, comme la volonté d’amenuiser le plus possible l’asymétrie du rapport chercheuses-habitant·es, ont conduit à la constitution d’un collectif de recherche. Réuni au sein de l’association Les Urbain.e.s, ce collectif a compris les habitantes, chercheurs et chercheuses, artistes… Les habitantes ont ainsi été partie prenante de l’ensemble du projet, du choix des terrains étudiés à la construction de protocoles et l’analyse des résultats, jusqu’à leur publicisation (écrite comme orale).

Cette démarche vise à restituer la place démocratique de la recherche publique au cœur des espaces quotidiens des habitant·es. Elle bénéficie d’habitudes de pratiques militantes de la part de certaines et participe du souhait de développer un travail où chacun·e des participant·es a voix au chapitre. Enfin, elle s’appuie sur certaines des méthodes et positionnements de l’éducation populaire en ce qu’elle a recherché à ne pas séparer l’action et l’analyse, ni celles et ceux qui font la ville, qui y vivent, de celles et ceux qui réfléchissent sur elle ou y décident3. Nous nous retrouvons ainsi dans la définition mobilisée par Adeline de Lépinay, sur son blog spécialisé, lorsqu’elle estime que l’objet de l’éducation populaire est « de favoriser l’émancipation et l’émergence de mouvements sociaux de transformation sociale portés directement par les personnes et les groupes sociaux qui subissent des mécanismes structurels d’oppression (économique, raciste, genrée, etc.)4 ».

L’une des caractéristiques de ce projet repose également sur son ancrage local. Il est en effet le reflet, mais aussi le fruit, d’un territoire particulier : Gennevilliers. Cette commune dite « de banlieue parisienne » est située au nord-ouest de la capitale, au nord du département des Hauts-de-Seine. Semblable à beaucoup d’autres, elle est marquée par l’histoire encore vive de la banlieue rouge industrielle, mais également par les dynamiques sociospatiales d’une région parisienne de plus en plus fragmentée et inégalitaire. D’après les chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), la ville comptait 47 702 habitant·es en 2018. Elle s’étend sur 1 164 hectares dans la boucle de la Seine. Un tiers de sa superficie est occupé par une zone d’habitat principalement constituée de logements collectifs (65 %), un tiers accueille les zones industrielles et d’activités, et le dernier tiers est consacré aux activités du Port autonome de Paris. À Gennevilliers, les situations socioéconomiques sont globalement défavorisées au regard de l’ensemble du département. Toujours selon les sources Insee, en 2019, la médiane du revenu annuel disponible par unité de consommation était de 17 640 € (contre 28 310 € pour le département) ; en 2018, le taux de chômage y était de 19,5 % (contre 8,4 % pour le département). Si les quartiers du Village et République (nouvel écoquartier) abritent des populations un peu plus aisées que sur les autres quartiers, Gennevilliers reste une ville plutôt populaire et homogène. Comme de nombreuses communes ouvrières, elle est marquée par la présence d’un tissu associatif dense et très diversifié. Ce maillage est complété par trois équipements culturels et sociaux et des conseils de quartier très actifs qui fournissent un relais solide aux dynamiques sociales et politiques de la ville. Toutes ces caractéristiques ont constitué un terreau aidant pour que la recherche-action participative puisse être facilement acceptée, et que des habitantes s’y engagent.

Enfin, en tant que recherche-action, ce projet s’ancre dans un contexte original qu’il nous faut expliciter. En effet, ce projet est né de la rencontre entre des scientifiques et une volonté municipale de dresser un état des lieux de la place des femmes (et des questions de genre) dans l’espace public gennevillois. Il ne répond pas directement à une commande, ce pourquoi nous ne parlerons pas de « commanditaire » pour qualifier la municipalité de Gennevilliers ; il s’agit davantage d’une démarche de collaboration avec les acteurs et actrices publics et politiques, ainsi qu’une restitution de la recherche au politique (compris comme la représentation démocratique des habitant·es), impliquant notamment de proposer des pistes de réflexion, parfois d’action.

L’objet de cet article est de présenter et discuter les choix de publication – et donc, aussi, de production et de valorisation de la recherche – qui ont été ceux de ce collectif d’artistes-chercheuses-habitantes durant six ans. Si cette recherche a fait l’objet de communications scientifiques « classiques » (articles à comité de lecture, communications lors de séminaires et colloques internationaux), elle a aussi été le support de différents formats dits « alternatifs » de production et de diffusion des savoirs. Nous discuterons certains d’entre eux ici : les journaux de terrain, les ateliers d’écriture mis en scène (pièces de théâtre) et, enfin, une carte sensible et un carnet de voyage.

Nous nous demanderons en quoi ces publications scientifiques alternatives découlent directement du cadre épistémologique et méthodologique du projet « La ville côté femmes ; comment le caractère « original » du format influence à la fois le savoir produit, sa diffusion ainsi que sa réception dans la sphère académique comme dans la société civile/politique ? Nous porterons un regard critique sur les enjeux, atouts et difficultés de ces outils et expérimentations de recherche participative. Enfin, nous discuterons de leur capacité à participer à l’empowerment des membres du projet, en ce qu’ils obligent à déconstruire certains a priori sur ce que l’on sait faire (capacités, savoirs) et sur ce que l’on doit faire (attendus scientifiques, politiques).

Des écritures alternatives dans un projet féministe participatif : pensées épistémologiques et réflexives

La réflexion que porte le programme « La ville côté femmes » est alimentée par une conception méthodologique et épistémologique féministe. Elle s’ancre dans une revendication d’un point de vue situé et dans la reconnaissance du « privilège épistémique » de la position des habitant·es de la ville. Commune industrielle et ouvrière, Gennevilliers est, comme nombre de ces territoires, marquée par l’action intersectionnelle de critères discriminants classistes, genrés et ethnoraciaux que les inégalités centre-périphérie renforcent par le biais de stéréotypes spatiaux. Le « privilège épistémique » est ainsi constitué par l’expérience des regards locaux influencés par le croisement de l’ensemble de ces stéréotypes. C’est dans ce cadre que le collectif de recherche a porté une attention particulière à la diffusion des résultats, à leur intelligibilité, leur accessibilité. Si les contenus ont été ainsi pensés, les formats ont également été interrogés dans le but de privilégier une diffusion associant exigence scientifique et variété de l’auditoire. Nous avons ainsi mobilisé différents types d’écriture alternative, différents formats de restitution de la recherche.

L’expression écriture alternative ne va pourtant pas de soi. Elle nous oblige à interroger et à nous accorder sur ce qui relève d’une écriture scientifique classique, communément acceptée donc. Nous pensons alors à des écritures textuelles, les plus objectives et transparentes possibles, et reposant sur certains codes. Il s’agit notamment d’un langage certes technique et soutenu, mais pas ou peu littéraire ; d’un usage du « nous » (censé être gage d’objectivité) plutôt que du « je » ; de textes d’un format et d’une taille normés ; de publications dans des revues spécifiques. Dans son intervention intitulée « L’écriture scientifique existe-t-elle ? », la chercheuse en science de l’éducation Maryvonne Charmillot rappelle que le souci, voire l’impératif d’objectivité dans l’écriture se traduit aussi par des verbes désincarnés, des phrases passives, par l’effacement du chercheur ou de la chercheuse, voire la perte de son identité derrière le « nous »5. Il y aurait ainsi une écriture – et donc un style, un format, des supports – propre à une communication scientifique et, dès lors, une autre qui ne le serait pas, le serait moins ou différemment ? Si le chercheur ou la chercheuse répond par la négative sur ce point, au-delà de la question de la légitimité scientifique d’un écrit, se pose aussi celle du statut qu’il ou elle souhaiterait maintenir en adoptant un certain style, un certain format d’écriture. L’adoption d’une certaine « raideur de style », voire de l’usage d’un vocabulaire explicitement complexe et métaphorique, permettrait à certains chercheurs et chercheuses de garantir la scientificité de leurs propos et de se protéger d’une confusion possible des genres6. C’est ainsi que « l’opposition classique entre esthétique et connaissance d’une part, rhétorique et analyse d’autre part, a pour fonction essentielle de tracer des limites entre science et non-science. Ce que fonde institutionnellement cette opposition, c’est aussi, par voie de conséquence, l’autorité sociale de celui qui l’énonce. Par l’écriture, en effet, chacun s’expose en même temps qu’il expose7 ». Dans la continuité, notre postulat est ici que le caractère scientifique repose sur la démarche, la méthodologie, et donc le contexte de production de la connaissance, et non pas sur ses attributs de scientificité. Toutefois, l’écriture n’intervient pas seulement au moment de la restitution de résultats. Elle intervient tout au long du processus de recherche et peut aussi constituer un outil de production du savoir. Enfin, à l’image de la présentation du Réseau national des écritures alternatives en sciences sociales, les écritures alternatives impliquent à la fois un support original, mais aussi une réflexion sur les conditions et positionnements épistémologiques qu’elles nécessitent : « la fabrication et la diffusion d’œuvres articulant texte, image et son [impliquent] des questionnements sur la narration et le recours au sensible dans l’analyse du social8 ».

Dès lors, et en nous appuyant sur ce qui a été produit et expérimenté dans le projet « La ville côté femmes », « notre » définition des écritures/publications alternatives repose sur quatre dimensions. Premièrement, ces écritures sont alternatives car des résultats, mis en mots, sont diffusés dans des publications ne relevant pas des réseaux scientifiques reconnus comme tels par les institutions dominantes (revues classées Hcéres – Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur –, revues de rang A, presses universitaires, etc.), échappant ainsi aux indices bibliométriques. Il s’agit alors de publier les résultats de la recherche dans des revues ou via des maisons d’édition non classées, ou n’appartenant pas au champ étiqueté comme scientifique. Nous pensons aux deux ouvrages collectifs nés de notre recherche-action et publiés aux éditions Le Temps des Cerises9. Deuxièmement, ces écritures sont alternatives à travers l’adoption de formats originaux. Nous pensons par exemple à des textes affichés dans l’espace public, à la mise en scène de textes lors de représentations théâtrales ou bien au carnet de voyage associant collage, photographie et dessin. Troisièmement, ces écritures sont alternatives car coécrites entre habitantes, chercheurs et chercheuses et artistes. Enfin, des écritures scientifiques sont alternatives en ce qu’elles répondent à un objectif, une posture de recherche, qui se veulent impliqués – c’est-à-dire en interaction directe et continue avec le terrain de recherche et relevant d’une éthique du care féministe. Il s’agit alors, par l’écriture et ses formats divers, de prendre soin de nos interlocuteurs et interlocutrices et de leurs territoires. Cela s’est notamment traduit par une recherche rendue publique, sur place, afin de tendre vers une accessibilité des connaissances la plus large possible.

Nous appellerons donc écriture alternative les médias de production et de restitution du savoir coconstruit qui, dans le cadre du projet « La ville côté femmes », comprennent des textes écrits sur une affiche ou issus d’ateliers d’écriture, puis mis en théâtre/en scène, mais aussi des écritures illustrées dans un carnet de voyage et une carte sensible. Ces différents exemples sont exposés dans la suite de ce texte.

Cette multiplicité des types, et surtout des supports, d’écriture s’ancre dans un contexte et un positionnement épistémique particuliers. Le point de départ du projet repose sur une connaissance antérieure de la commune de Gennevilliers et de ses actrices et acteurs publics, associatifs, voire économiques, pour deux des chercheuses (l’une y habite et a travaillé dans les services de la mairie, les deux l’ont préalablement parcourue pour leurs travaux de thèse), pour une troupe de théâtre (La Compagnie Sans la nommer, dont les membres sont issus du territoire) et, bien évidemment, pour les habitantes impliquées dans le projet. Cette connaissance préalable permet, par exemple, de connaître les moyens et les lieux d’information connus des habitant.es, et donc de cibler au mieux les espaces propices à la diffusion des savoirs (espaces publics et/ou locaux associatifs, présentations formelles et/ou usage du « bouche à oreille , etc.), ou bien encore d’identifier la nécessité, et les moyens, de produire une information régulière à destination des habitant·es, autant pour les informer du déroulement de la recherche que pour les y convier.

Enfin, il nous apparaît nécessaire de resituer le contexte politique du démarrage de ce projet. En effet, 2013 est l’année de la promulgation de la loi permettant le mariage de personnes de même sexe, et le mois de septembre a connu la mise en œuvre expérimentale du programme scolaire dit des « ABCD de l’égalité », visant à déconstruire les stéréotypes de genre. Ces deux décisions gouvernementales font l’objet de vives critiques et de fausses interprétations. Ce qui apparaissait donc comme une nécessité éthique et méthodologique – communiquer sur nos travaux auprès de la population – devient une quasi-obligation pour court-circuiter toute rumeur et assurer un déroulement paisible de nos travaux, son acceptation et la participation des habitant·es.

Des publications alternatives pour construire et diffuser collectivement les résultats du projet

Les outils que nous présentons ici résultent de différentes démarches d’élaboration (écritures collaboratives, projet de fin d’étude en architecture encadré), et empruntent des formats (écrit, oral, dessin, collage, photographie) et des supports (affichage public, représentations théâtrales, ouvrage collectif publié, carnet de voyage, cartographie « à colorier ») variés.

Journaux de terrain : écrire en commun et afficher la recherche dans l’espace public

Dans le cadre de cette recherche-action, deux de nos préoccupations majeures étaient de rendre la recherche accessible et de produire un savoir de façon collective. Ce double objectif s’est notamment traduit par la réalisation de ce que nous avons appelé les journaux de terrain. Ces journaux présentent certains résultats ou enquêtes en cours. Ils ont pour but de s’adresser aux habitant·es de la commune, au plus proche de leurs lieux de vie, dans l’espace public et dans la ville même de la recherche. Ces supports sont le fruit d’un travail d’écriture à plusieurs mains, impliquant différents membres du collectif : universitaires, artistes et/ou habitantes, selon les numéros.

Avec l’aide d’une graphiste, Claire Pasquet, nous avons ainsi publié ces journaux de façon semestrielle tout au long du projet. Leur format s’appuie sur des journaux de quartier publiés par les comités de quartier. L’un d’eux, « La Minute des Agnettes », est un grand format affiché dans les halls des immeubles. Toutefois, notre communication devait aussi pouvoir être donnée de la main à la main, lors d’événements auxquels nous participions, comme les manifestations municipales autour du 8 mars, du 25 novembre ou encore le forum des associations, au début du mois de septembre. Notre journal de terrain devient donc une affiche A2 qu’il est possible de plier en quatre, de manière à être facilement glissé dans les boîtes aux lettres et transportable. Il compte 5 000 à 7 500 signes répartis entre un texte principal de résumé des résultats de la recherche et quelques autres informations sur les initiatives à venir.

Figure 1. Journaux de terrain : outils de diffusion de la recherche vers/dans le territoire via l’affichage dans les halls d’immeuble de la ville

Figure 1. Journaux de terrain : outils de diffusion de la recherche vers/dans le territoire via l’affichage dans les halls d’immeuble de la ville

© Les Urbain.e.s

 

 

© Les Urbain.e.s

 

 

© Les Urbain.e.s

Au fil du temps, ces journaux de terrain constituent une collection qui rassemblent nos principales thématiques de travail. Au cours des six années de la recherche-action, sept thématiques ont ainsi été abordées dans ces journaux : l’analyse de cartes mentales de déplacement, l’atelier d’écriture, la nuit, les ambiances, les jardins partagés, les déplacements à vélo... Le dernier numéro présente des dessins de projets de microaménagements dans des espaces publics reconnaissables par les habitant·es, produits par l’atelier de paysage SensOmoto.

Figure 2. Dessiner des résultats, proposer un autre avenir de ville : exemple de planche produite par l’atelier de paysage SensOmoto dans le cadre du projet « La ville côté femmes »

Figure 2. Dessiner des résultats, proposer un autre avenir de ville : exemple de planche produite par l’atelier de paysage SensOmoto dans le cadre du projet « La ville côté femmes »

© SensOmoto

Enfin, en tant que médias, ces journaux de terrain ont permis d’informer les habitant·es de Gennevilliers de l’existence d’autres formes d’écriture, d’un atelier ou de la publication de nos travaux de recherche. Ils ont également été utilisés pour présenter les pièces de théâtre écrites et jouées par les habitantes, les extraits d’un carnet de voyage ou la carte sensible également produits dans le cadre du projet.

De l’atelier d’écriture aux pièces de théâtre : raconter, écrire et jouer sa ville

Conscientes des limites du format papier et de l’écrit (en français), nous avons aussi cherché à construire d’autres formats de communication, associant l’écriture à l’oralité. Il s’agissait, dans le contexte gennevillois, non pas de prétendre à l’exhaustivité ou à la représentativité10, mais de lutter, autant que possible, contre toute forme d’humiliation induite par des violences symboliques (de classes, de langue, etc.). Nous ne pouvions en effet pas ignorer la difficulté de réception de la recherche et de la production scientifiques par la majeure partie de la population. Faisant écho à ce que Bernard Sobel, fondateur du Théâtre de Gennevilliers, résume à propos du théâtre – qui, même portes grandes ouvertes, se traduit dans ces territoires par un « ce n’est pas pour nous »11 –, nous savions que nos travaux excluent avec la même violence. En être conscientes est indispensable pour redessiner nos pratiques de recherche, c’est la raison principale de l’existence des ateliers d’écriture et de création théâtrale.

Nous avions initialement imaginé un atelier de mise en récit et d’écriture du vécu de la ville par certaines femmes. Il s’agissait pour elles de (se) raconter, écrire, pour elles-mêmes comme aux autres, leur vécu de la ville, de son espace public. Cette démarche a évolué, s’est adaptée aux contextes et aux protagonistes de cette expérimentation. Les propos de Damien Labruyère soulignent le caractère évolutif de cette partie du projet : « J’ai délibérément mené les participantes vers ce qu’est l’écrit, et non plus l’écriture, au sein d’une création, d’un espace non plus public mais absolument intérieur, intime. Dès lors, quittant le témoignage et l’espace public, nous avons ouvert un nouveau territoire, celui d’une vérité autant subjective qu’indiscutable, celui de la fiction, de l’invention, de la création12. » Cette évolution elle-même illustre le processus d’appropriation de ces femmes à cette forme d’écriture, à l’outil artistique, et de leur légitimité à contribuer au projet de recherche via leur point de vue personnel, mais aussi à travers une expression artistique qui leur semblait initialement bien loin de leur vie, et tout autant de la sphère de la recherche.

De 2015 à juin 2019, quatre créations ont ainsi été présentées publiquement dans la salle de spectacle de la Maison du développement culturel. L’atelier a regroupé jusqu’à dix participantes. Ce sont ainsi dix-huit femmes de 18 à 80 ans, de tous les quartiers de la ville, qui ont participé à l’écriture, à la mise en scène et au jeu sur scène. La première pièce, Une place à soi, porte sur la place des femmes dans l’espace urbain ; La Promesse de Barbara poursuit ce regard sur la ville mais l’ouvre aussi sur l’altérité qui enrichit « la ville des ailleurs ». Enfin, Cet enfant-là rend compte des mémoires collectives. Prévu pour l’été 2020, Extraction 20.20 n’a finalement pas été créé, faute au Sars-Cov-2. Chaque fois, les participantes ont pensé ensemble leur personnage, ont écrit le texte de leur rôle et l’ont joué. En tout, elles ont participé à treize représentations. D’autres expériences scientifiques sont passées par une extension théâtrale de la publicisation de leurs travaux13. Or, il ne s’agit pas ici de faire du théâtre avec la parole des habitantes, mais avant tout de leur laisser une place centrale, à elles : produire et posséder l’entièreté du projet théâtral14.

Figure 3. Le théâtre dans le projet « La ville côté femmes » : de l’atelier d’écriture à la mise en scène et à la représentation publique

Figure 3. Le théâtre dans le projet « La ville côté femmes » : de l’atelier d’écriture à la mise en scène et à la représentation publique

Affiche : © Claire Pasquet. Photographie : © Guillaume Clément

Ces ateliers théâtre se sont avérés formateurs/transformateurs pour les personnes impliquées, certaines d’entre elles n’ayant jamais fait de théâtre ni expérimenté cette forme d’écriture et de mise en scène d’un texte. Quelques femmes, se définissant comme très timides, peu enclines à « monter sur scène » –, et ce d’autant plus dans leur ville et donc, devant des personnes de leur entourage –, ont finalement dépassé des peurs et témoigné de leur intérêt et de leur plaisir d’y participer, pour certaines tout au long des cinq années d’ateliers. Parfois comme une découverte, parfois comme un retour, la pratique du théâtre a pour elles participé d’un nouvel apprentissage, de l’expérimentation d’un art (l’écriture pour la scène). Pour toutes, ces ateliers de théâtre ont aussi été un lieu de prise de conscience des comportements et des conceptions des rapports genrés dans l’espace. Ces réajustements des rapports à l’espace ont à la fois participé à la fabrique d’une ville plus accessible et agréable pour ces femmes, au quotidien, et alimenté les résultats de la recherche-action, fournissant in fine des éléments de diagnostic pour les différents services de la collectivité. Les écrits et les mises en scène de ces textes ont en effet apporté un nouveau/autre regard sur certaines questions au cœur du projet de recherche, sur leurs ressentis dans certains lieux de l’espace public, à certaines heures, sur l’importance attribuée aux souvenirs, au passé familial et industriel de la ville, ou bien sur leurs expériences présentes de l’espace par exemple. Enfin, ces écrits, personnels, subjectifs par essence, ont ainsi pu nourrir notre appréciation du territoire d’étude et interroger nos propres représentations de celui-ci.

Carnet de voyage et carte sensible : au-delà des mots

L’exploration des formats alternatifs de construction et de restitution d’une démarche de recherche s’est également traduite par des objets graphiques : une cartographie sensible et un carnet de voyage de la ville de Gennevilliers associant collage, photographie et dessin.

La pratique de la géographie dessinée – des croquis de terrain –, souvent descriptive, s’est trouvée reléguée au rang des outils anciens, peu agiles, face au développement d’outils numériques. Pourtant, depuis, les récents travaux d’Élise Olmedo (2015, 201715), d’Agnès Stienne (2019, 202116) ou de Fabien Roussel et Émilie Guitard (202117) montrent que la rencontre du dessin, du croquis d’analyse, de la pratique cartographique et de la géographie est d’une actualité méthodologique et épistémologique tout à fait importante, en particulier dans la construction du rapport au terrain. La lenteur inhérente au croquis implique une présence longue dans l’espace, visible, et ceci bien plus qu’avec la photographie ou le film. De plus, le dessin prend des formes qui tendent à se diversifier. Du croquis de terrain à la mise en image de subjectivités habitantes, le dessin peut être un outil de réflexion et de restitution des résultats du chercheur ou de la chercheuse, mais aussi un matériau directement produit par les enquêté·es.

C’est dans cette double dimension – outils et matériaux – que le dessin a été conçu et mobilisé dans le projet « La ville côté femmes ». Il a ainsi été au cœur du travail d’une étudiante travaillant dans le projet, Chloé Mercier, qui a proposé une carte sensible dessinée de la ville. La carte sensible est une des façons de représenter l’espace, à partir d’un point de vue subjectif, et en mobilisant non plus des figurés classiques de la sémiologie graphique, mais des procédés graphiques, artistiques, divers (aquarelle, crayonnage, avec ou sans couleur, etc.). C’est un moyen de synthétiser et de valoriser des informations sur la façon dont les personnes perçoivent l’espace, se le représentent ou le pratiquent.

Dans le cadre du projet « La ville côté femmes », il s’est agi de demander à une personne ne connaissant pas Gennevilliers de représenter la ville selon son ressenti personnel. Dans le second ouvrage collectif issu du projet18, Chloé Mercier présente sa carte sensible ainsi :

J’ai choisi de réaliser cette cartographie à la toute fin de mon stage, afin d’accumuler un maximum d’expériences et d’anecdotes sur Gennevilliers. J’ai commencé par placer des lieux « emblématiques » de mon stage […] Après cette première étape de détermination des lieux à représenter et de leur emplacement sur la carte au crayon de papier, le dessin s’organise suivant trois principaux axes de travail : limites, liens et détails. Quelles sont les limites de la ville selon mon expérience ? Quels sont les liens entre les différents éléments de la carte, qu’est-ce qui les unit, les sépare ? Quelles sont les histoires à raconter, les détails graphiques qui permettront aux gens d’identifier leur ville dans mon dessin19 ?

Dans cet exemple, cette mobilisation d’une vision subjective de l’espace se traduit à deux échelles : d’une part, ce qu’elle a considéré comme relevant d’une connaissance générale et publique de la ville, qui serait accessible à toute personne décidant de se balader dans Gennevilliers (bâtiments publics, port, station de métro, espaces verts, etc.) ; et sa connaissance intime d’autre part, celle qu’elle a accumulée au fil de ses expériences de l’espace gennevillois (le photographe du projet dans l’espace public, son vélo garé en un lieu précis de la ville, etc.). Enfin, comme dans toute carte sensible, tous ces éléments ne sont pas représentés tels qu’ils sont en réalité. Les distances, les échelles sont distordues, des jeux de mots ou des métaphores apparaissent, des lieux se superposent et d’autres apparaissent alors qu’ils n’ont pas, ou plus, de réalité physique (passé horticole de la ville symbolisé par les poireaux, par exemple).

Fruit d’une subjectivité, individuelle donc, la carte sensible peut aussi devenir un objet à partir duquel échanger, se questionner, collectivement. Ce fut le cas lors d’une journée d’étude organisée dans le cadre du projet, le 19 octobre 2018, à Gennevilliers. La carte de Chloé Mercier a été exposée, et des feutres mis à disposition. Elle a fait l’objet de discussions entre habitant·es, avec des élu·es, des artistes et des chercheurs et chercheuses présent·es. Bien que de façon ponctuelle, le temps d’un affichage, cette « écriture » alternative de la ville a ainsi constitué le support d’une certaine fabrique collective de la ville.

Figure 4. Cartographie sensible de la ville de Gennevilliers : dessiner « sa » ville, partager son ressenti de l’espace

Figure 4. Cartographie sensible de la ville de Gennevilliers : dessiner « sa » ville, partager son ressenti de l’espace

© Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

Le dessin a aussi été l’un des moyens, pour des habitant·es de Gennevilliers, de réaliser un carnet de voyage pour restituer leur ville. Le carnet de voyage de Gennevilliers a été réalisé par trois Gennevilloises et Chloé Mercier, entre avril et juin 2018. Elles se sont réunies avec le projet de faire découvrir non pas la ville de Gennevilliers mais leur ville, ce qu’elle leur évoque, leur/s rencontre/s avec elle et ce qu’elles savent de son histoire. Le projet de carnet de voyage est né d’une volonté de montrer cette ville de banlieue aimée et habitée, mais également – sinon plus – de la redécouvrir, tant elle évolue, se réécrit, tel un palimpseste sans cesse retracé. Les quatre femmes ont pris des photos, fait des relevés dessinés et aggloméré toute sorte de documentations. Elles se sont réunies toutes les deux semaines pendant deux mois, ont retravaillé, réorganisé, recoupé, mélangé la ville.

Le travail qu’elles ont produit est une promenade à travers les huit quartiers de la ville ; entre le dur du minéral, du bâti, du réel, d’une part, et l’imaginaire, les souvenirs, les récits entendus et appropriés, d’autre part. C’est une partition en images d’une légende orale transmise et consignée lors des séances de préparation de l’objet final. Conçu « en accordéon » (ou Loporello), il se déplie pour donner à voir trente-quatre pages cartonnées composées de fragments de discours, de photos, de dessins et de collages.

Figure 5. Fragments d’un itinéraire imagé-imaginé à travers Gennevilliers

Figure 5. Fragments d’un itinéraire imagé-imaginé à travers Gennevilliers

© Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

 

 

© Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

Tout comme les textes des différentes pièces de théâtre, ces deux formats d’écriture alternative ont participé d’un processus de coconstruction de connaissances, dans un projet de recherche plus vaste. Ils ont proposé une vision autre, singulière, mais non moins réelle, du vécu de l’espace public gennevillois par une femme, des femmes (qu’elles soient gennevilloises ou non). L’attachement, voire le fort niveau d’investissement de certaines habitantes au sein des jardins partagés de la ville a par exemple été largement documenté par une enquête menée au sein du projet (entretiens semi-directifs et observations20 ; il transparaît aussi dans le carnet de voyage. Ces espaces collectifs de jardinage apparaissent en effet sur cinq pages différentes, sous forme de photos ou bien de textes, témoignant d’un souvenir ou de l’importance de ces lieux dans le vécu de ces femmes gennevilloises.

Se pose alors la question de la diffusion de ce type d’écritures scientifiques comme outils de valorisation de connaissance. Comment, où, et donc auprès de qui diffuser de tels récits/dessins/cartes ou carnets ? Ces questions sont ici des plus pertinentes. En effet, au cœur de notre recherche-action, les journaux de terrain avaient vocation à être affichés dans les halls d’immeubles et donc, de s’adresser exclusivement aux habitant·es de Gennevilliers ; de la même manière, notre pièce de théâtre a elle aussi été jouée « sur place », au cœur même du terrain d’étude. Or, la carte sensible imprimée en A3 et le carnet de voyage, lui aussi imprimé sur du papier cartonné, ont aussi été offerts de « la main à la main » à Gennevilliers. Les personnes ayant participé au projet en possèdent, bien sûr. Le carnet, considéré comme « beau », est devenu un objet de désir au moment de sa publication, et un témoignage de leur attachement à la ville de la part de nombreux et nombreuses habitant·es rencontré·es.

Pour conclure : difficultés, limites et perspectives

Le caractère alternatif des publications scientifiques telles qu’elles ont été produites dans le cadre de notre recherche-action induit inévitablement un écueil : celui de l’hétérogénéité de l’implication et des productions des personnes. On sait que cet aspect est inhérent à toute entreprise collective, et d’autant plus lorsque les ressorts de satisfaction sont divers. Le contexte de connaissance préalable de la ville par deux des chercheuses du collectif a induit un recrutement par interconnaissance, au moins au début. Ce type de recrutement fut aussi, en partie, celui du programme dans sa globalité, mais également pour les divers ateliers produisant des objets de présentation des résultats. Cela a donc induit un recrutement par affinités culturelles, sociales, générationnelles, de personnes partageant un rapport régulier à l’écrit. Ce faisant, une femme venant à l’atelier d’écriture « pour apprendre à écrire », cette autre, pour qui « imaginer autre chose que le quotidien est impossible », ou cette dernière, seule avec son fils, ne sont pas restées dans le projet, malgré ce que nous avions pensé adapter pour elles. Ce rapport d’humiliation, évoqué en début de ce texte, n’est finalement que partiellement résolu.

Une autre difficulté – qui interroge non pas tant le fonctionnement interne du projet et des écritures alternatives produites mais plutôt le rapport de celles-ci au champ scientifique – est celle de la possibilité de transposer et valoriser de tels « objets » dans les réseaux et sphères scientifiques. La carte sensible et le carnet de voyage ont été exposés lors de la journée d’étude d’octobre 2018 ; le carnet a également été présenté aux Rendez-vous du carnet de voyage de Clermont-Ferrand, du 16 au 18 novembre 2018. Or, force est de constater que les espaces, les formats de publication, voire la validation scientifique par les pairs de ce type de supports de recherche sont peu nombreux. Si les points de jonction entre sciences sociales et expressions artistiques, entre recherches, actions et expérimentations collectives sont de plus en plus variés21, et diffusés, ils restent souvent à l’écart des enseignements méthodologiques et épistémologiques.

Il nous apparaît également important d’insister sur le caractère multidimensionnel de la part « éducative » de ce type de démarches. Nous considérons que cette recherche a été le vecteur d’apprentissages transformateurs22 pour les différents types d’acteurs et d’actrices impliqués : les habitantes, les chercheuses et la ville (élu·es et technicien·nes). En effet, les habitantes impliquées ont acquis ou développé des compétences en matière d’écriture et d’expression artistique. Elles ont aussi découvert la démarche et certaines méthodes de recherche en sciences sociales. Enfin, certaines d’entre elles ont pu réévaluer leurs rapports à leur espace quotidien, leur ville, leur quartier. Les chercheuses ont elles aussi beaucoup appris : sur un objet de recherche (le genre et la ville), mais également sur leur métier. En effet, ce projet leur a permis de découvrir combien ces écritures alternatives de la recherche pouvaient mobiliser l’art (principalement du théâtre, ici). Le sens de nos métiers a également pris une autre ampleur, celle du lien direct entre la recherche et l’action au travers des médias, jusqu’alors peu mobilisés par les membres du projet. Ces écritures alternatives de la recherche ont aussi éclairé la ville/municipalité sur elle-même, et là est certainement l’un des enseignements majeurs sur les apports de ces formes alternatives d’écriture scientifique : leur capacité à « parler » à une multitude d’acteurs et d'actrices, et à « servir » à la fois le raisonnement scientifique et la fabrique de la ville par ses acteurs et actrices politiques et professionnel·les.

Enfin, le caractère transformateur du projet n’est pas uniquement un résultat, un bilan que nous pouvons poser à son issue. Il s'est en effet révélé être un véritable outil méthodologique, central, de la recherche et de son développement. C’est-à-dire que, tout au long du projet, c’est à travers cet apprentissage transformateur continu qu’ont émergé de nouveaux axes de travail, de nouvelle idées de collaboration ; et à travers lui, aussi, que chacun·e a fait évoluer le projet en rapport avec l’évolution de ses propres savoirs et expériences.

Cette recherche-action a donc été construite et menée comme une invitation à « jouer ». Invitation à prendre du plaisir à penser, à imaginer, à créer, à prendre soin de soi, le tout avec le plus grand sérieux.

« Je ne pensais pas qu’on allait autant se lâcher », ont témoigné deux habitantes-participantes à l’atelier « carnet de voyage »23.

Cette courte phrase pourrait certainement avoir été prononcée par la quasi-totalité des participant·es-écrivain·nes (qu’ils soient chercheurs ou chercheuses, ou habitant·es) des différents supports présentés dans cet article. Si la joie a traversé la production de ces écritures alternatives de la recherche, ces autres façons de faire et d’écrire la recherche ensemble, l’impression d’aller au-delà de ce que l’on imaginait au départ, d’apprendre, fut elle aussi partagée.

Notes

1 https://urbaines.hypotheses.org

2 Pierre-Marie Mesnier, Philippe Missotte, 2003, La Recherche-action. Une autre manière de chercher, se former, transformer, Paris, L’Harmattan.

3 Adeline de Lépinay, 2019, Organisons-nous ! Manuel critique, Marseille, Éditions Hors d’atteinte.

4 http://www.education-populaire.fr/definition/

5 Maryvonne Charmillot, 2010, « L’écriture scientifique existe-t-elle ? », séminaire « Les aspects concrets de la thèse », 5 novembre 2010, Paris, EHESS [retranscription disponible en ligne : https://act.hypotheses.org/564].

6 Martyne Perrot, Martin de la Soudière, 1994, « L’écriture des sciences de l’homme : enjeux », Communications, n° 58 : L’écriture des sciences de l’homme, p. 5-21 [en ligne : https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1994_num_58_1_1875].

7 Ibid., p. 9.

8 https://gdrecritures.hypotheses.org/reas

9 Emmanuelle Faure, Corinne Luxembourg, Edna Hernández-González, 2017, La ville : quel genre ? L’espace public à l’épreuve du genre, Montreuil, Le Temps des Cerises ; Corinne Luxembourg, Damien Labruyère, Emmanuelle Faure, 2020, Les Sens de la ville. Pour un urbanisme de la vie quotidienne, Montreuil, Le Temps des Cerises.

10 Nous ne développerons pas, ici, la question méthodologique importante de la recherche de l’exhaustivité ou de la représentativité en sciences sociales, et au sein de notre projet de recherche. Cette dimension est abordée spécifiquement dans deux chapitres des ouvrages collectifs publiés en 2017 et 2020 (Corinne Luxembourg, 2017, « La ville côté femmes : une recherche-action à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) », in Emmanuelle Faure, Corinne Luxembourg, Edna Hernández-González, La ville : quel genre ? L’espace public à l’épreuve du genre, op. cit., p. 279-301 ; Corinne Luxembourg, Juliette Morel, Danielle Grimont, 2020, « Raisons et récit d’une construction méthodologique de recherche-action », in Corinne Luxembourg, Damien Labruyère, Emmanuelle Faure, Les Sens de la ville. Pour un urbanisme de la vie quotidienne, op. cit., p. 18-40).

11  Cité in Damien Labruyère, Corinne Luxembourg, 2019, « Une expérience de création culturelle dans une recherche-action : un pouvoir émancipateur multiple », Le Journal de Culture & Démocratie, n° 50 [en ligne : https://lejournaldeculturedemocratielasuite.wordpress.com/category/journal-50/].

12 Ibid.

13 Élise Vinet, 2017, « Rechercher en actions et sur l’action artistico-scientifique pour quelles transformations ? », in Emmanuelle Faure, Corinne Luxembourg, Edna Hernández-González, La ville : quel genre ? L’espace public à l’épreuve du genre, op. cit., p. 263-278.

14 Damien Labruyère, 2020, « Sans savoir », in Corinne Luxembourg, Damien Labruyère, Emmanuelle Faure, Les Sens de la ville. Pour un urbanisme de la vie quotidienne, op. cit., p. 14-17.

15 Élise Olmedo, 2015, Cartographie sensible. Tracer une géographie du vécu par la recherche-création, Thèse de doctorat en géographie, Université Paris 1 ; 2017, « L’expérimentretien comme méthode d’enquête. Cartographie sensible et terrains de recherche collaboratifs entre art et géographie », Mappemonde, n° 12 [en ligne : https://journals.openedition.org/mappemonde/3776?lang=en].

16 Agnès Stienne, 2019, « Dépaysages de palmiers à huile » [en ligne : https://visionscarto.net/depaysages-de-palmiers-a-huile] ; 2021, « L’utopie à portée de ville » [en ligne : https://visionscarto.net/l-utopie-a-portee-de-ville].

17 Fabien Roussel, Émilie Guitard, 2021, « L’usage du dessin dans l’enquête de terrain en sciences sociales. État des lieux et perspectives depuis la géographie et l’anthropologie », Carnets de Terrain (blog de la revue) [en ligne : https://blogterrain.hypotheses.org/17117].

18 Cette proposition, comme le carnet de voyage, a pris place au sein du mémoire de fin d’études de Chloé Mercier à l’École nationale supérieure d’architecture Paris-La Villette, soutenu en 2018.

19 Chloé Mercier, 2020, « Le regard sur le regard. Carnet de voyage et carte sensible de Gennevilliers », in Corinne Luxembourg, Damien Labruyère, Emmanuelle Faure, Les Sens de la ville. Pour un urbanisme de la vie quotidienne, op. cit., p. 44-59.

20 Emmanuelle Faure, Angélique Dupont, Corinne Luxembourg, 2020, « Agriculture urbaine à Gennevilliers. Genre et la fabrique de la ville », in Corinne Luxembourg, Damien Labruyère, Emmanuelle Faure, Les Sens de la ville. Pour un urbanisme de la vie quotidienne, op. cit., p. 314-335.

21 Nous citerons ici le Réseau national des écritures alternatives en sciences sociales et ses deux salons (en 2020 et 2021), mais aussi, en géographie, des blogs ou revues en ligne comme Visionscarto, Carnets de Terrain ou bien l’ouvrage de Nepthys Zwer et Philippe Rekacewicz, 2021, Cartographie radicale. Explorations, Paris, La Découverte, par exemple.

22 Jack Mezirow, Edward Taylor, 2009, Transformative Learning in Practice. Insights from Community, Workplace and Higher Education, San Francisco, Jossey-Basz.

23 Chloé Mercier, 2020, « Le regard sur le regard. Carnet de voyage et carte sensible de Gennevilliers », op. cit.

Illustrations

  • Figure 1. Journaux de terrain : outils de diffusion de la recherche vers/dans le territoire via l’affichage dans les halls d’immeuble de la ville

    Figure 1. Journaux de terrain : outils de diffusion de la recherche vers/dans le territoire via l’affichage dans les halls d’immeuble de la ville

    © Les Urbain.e.s

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  • Figure 2. Dessiner des résultats, proposer un autre avenir de ville : exemple de planche produite par l’atelier de paysage SensOmoto dans le cadre du projet « La ville côté femmes »

    Figure 2. Dessiner des résultats, proposer un autre avenir de ville : exemple de planche produite par l’atelier de paysage SensOmoto dans le cadre du projet « La ville côté femmes »

    © SensOmoto

  • Figure 3. Le théâtre dans le projet « La ville côté femmes » : de l’atelier d’écriture à la mise en scène et à la représentation publique

    Figure 3. Le théâtre dans le projet « La ville côté femmes » : de l’atelier d’écriture à la mise en scène et à la représentation publique

    Affiche : © Claire Pasquet. Photographie : © Guillaume Clément

  • Figure 4. Cartographie sensible de la ville de Gennevilliers : dessiner « sa » ville, partager son ressenti de l’espace

    Figure 4. Cartographie sensible de la ville de Gennevilliers : dessiner « sa » ville, partager son ressenti de l’espace

    © Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

  • Figure 5. Fragments d’un itinéraire imagé-imaginé à travers Gennevilliers

    Figure 5. Fragments d’un itinéraire imagé-imaginé à travers Gennevilliers

    © Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

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    © Chloé Mercier pour Les Urbain.e.s

Citer cet article

Référence électronique

Emmanuelle Faure et Corinne Luxembourg, « Écrire, jouer et dessiner la recherche. Coconstruction et diffusion des savoirs par et vers le terrain », Pratiques de formation/Analyses [En ligne], 66 | 2023, mis en ligne le 01 janvier 2023, consulté le 24 novembre 2024. URL : https://www.pratiquesdeformation.fr/82

Auteurs

Emmanuelle Faure

Maîtresse de conférences en géographie, Université Paris-Est Créteil, Lab’Urba

Corinne Luxembourg

Professeure de géographie, Université Sorbonne Paris Nord, Pléiade