Témoignage d’une doctorante sur le processus de relance de Pratiques de formation/Analyses. Mes écritures « altern’hâtives »

  • Testimony of a PhD student on the process of relaunch of Pratiques de formation/Analyses

Résumés

Pratiques de formation/Analyses est une revue formative dont le comité encourage les étudiant·es en master ou doctorat à participer au processus éditorial. Ce texte souhaite témoigner de cette philosophie. En toute subjectivité, l’autrice, doctorante de première année, présente ses contributions et les questionnements nés dans le cadre de sa participation.

Pratiques de formation/Analyses is a formative journal whose editorial board fosters master and doctoral students’ participation in the editorial process. This testimony is a reflection of this spirit. The author, a first-year doctoral student, presents her contributions and questions arising from her participation.

Index

Mots-clés

témoignage, revue, recherche

Keywords

testimony, review, research

Texte

Doctorante depuis six mois et membre du groupe de relance de Pratiques de formation/Analyses, je me trouve – à la veille de la date limite de rendu de ma copie – écrivant mon premier texte pour la revue ! De même, il y a deux jours, je finissais la relecture de deux articles, en vue de leurs publications. Cela pourrait paraître brutal et/ou maltraitant, mais il n’en est rien. Je suis totalement volontaire. Peut-être que devenir chercheuse, c’est accepter de développer un sens de l’urgence et un rapport au temps particuliers ? À la fois en toute hâte et tout en longueur ? Accorder un temps infini à la retranscription d’interminables entretiens, passer des jours entiers à analyser ses journaux de terrain et, en même temps, avoir des fulgurances, des euréka !, des idées aussi soudaines qu’inattendues ? Pratiques de formation/Analyses ne me semble pas échapper au paradoxe temporel : d’un côté, des réunions régulières, planifiées, sans faille ; un rétroplanning de dates clés bien déterminé ; et de l’autre, des idées pertinentes qui fusent et une part (grisante) de précipitation qui demeure.

Me voilà donc plongée dans le grand bain du processus éditorial. Au début de ma thèse, j’imaginais que ma toute première contribution à une revue serait le fruit de plusieurs semaines d’élaborations et de quelques insomnies, pour obtenir le privilège d’être publiée. Bien sûr, j’ai conscience qu’il ne s’agit pas ici d’un article mais d’un témoignage. Pourtant, la démarche a le mérite de désacraliser l’acte éditorial, de le rendre accessible. C’est aussi ça, Pratiques de formation/Analyses : donner la possibilité d’expérimenter, d’oser, de s’exprimer dans sa singularité. Nos réunions sont elles-mêmes porteuses de ce principe : chacun peut s’y exprimer, donner ses idées, faisant cheminer les réflexions des autres. C’est un bouillon de culture et de savoir. Je l’avoue, je suis encore quelque peu intimidée par certains membres dont j’ai lu et cité les écrits dans mon mémoire ! Mais, petit à petit, j’ose et propose. Par exemple, je me suis aventurée à créer quelques visuels pour le logo de la revue, pour donner une base à la graphiste professionnelle qui s’en chargera.

J’avais été intéressée par l’histoire du premier logo, reflétant le titre de la revue, dans lequel l’« analyse » traverse littéralement les « pratiques de formation ».

 

 

Au-delà des aspects formatifs, participer à ce numéro revêt un sens tout particulier pour moi puisque le thème – les écritures alternatives – résonne (et raisonne) avec mon sujet de thèse. Travaillant sur la formation des agent·es pénitentiaires, je questionne la place et la fonction de l’écriture dans leur cursus, compte tenu des caractéristiques de la culture carcérale : en prison, écrire est empreint de certaines connotations (procédurales, contraignantes, superfétatoires, etc.). Mon questionnement porte sur la possibilité d’une écriture réflexive dans ce contexte. Ce numéro de la revue propose qu’un podcast, une bande dessinée – et tout autre alternative à l’écriture classique – soutiennent une réflexivité et nourrissent les chercheur·ses, ainsi que la recherche en général. Pour l’amoureuse de l’écriture que je suis, cela a ouvert de nombreuses perspectives. Par exemple, en lisant l’article de Servane Boursier1, je prends particulièrement conscience que l’écriture n’est pas uniquement textuelle. Elle peut être également graphique. La réflexivité n’est pas dans le geste, ou dans l’outil scripteur, elle est ailleurs…

Enfin, les échanges avec le groupe Pratiques de formation/Analyses m’ont amenée à interroger, au-delà de l’écriture, la diffusion de la recherche. Lors de la table ronde du 11 janvier 2022, lorsque Pascal Nicolas-Le Strat aborde les « brèves de recherche » affichées aux murs d’un lieu en rénovation2, je me demande quelles conséquences pourraient avoir une telle action sur mon terrain « pédagogico-carcéral », au sein duquel les murs jouent un rôle si particulier : ils cloisonnent, délimitent, enferment. Mais, paradoxalement, ils sont aussi longés, passés, voire « dépassés ». Ces murs pourraient-ils « soutenir » (au sens propre comme au sens figuré) des données issues de la recherche et susciter apprentissages et réflexivité ? Les codes pénitentiaires se verraient-ils bousculés, tels que les codes universitaires semblent l’être face à des écritures scientifiques alternatives ?

Par ailleurs, ces canons éditoriaux sont susceptibles de rendre la recherche difficile d’accès, illisible et obscure. Des « écritures » alternatives aideraient-elles à diffuser la recherche ? D’aucun·es ont pu me dire que ce n’est pas à la chercheuse ou au chercheur de se rendre accessible mais à « l’usager·ère » de s’y intéresser… Curieuse vision de la recherche... Au-delà de la revue, Pratiques de formation/Analyses m’aide à réfléchir à ma conception de la recherche et au type de chercheuse que je souhaite devenir. Reprenant le titre de l’une de ses rubriques, je suis « en cheminement »…

Notes

1 « “Écriture” alternative dans une thèse de doctorat. Essai sur l’utilisation de la bande dessinée à l’université », à lire dans le présent numéro de Pratiques de formation/Analyses.

2 Ces « Brèves de recherche » ont été publiées sous forme de pliage chez Ours éditions, en 2021. Voir http://fabriquesdesociologie.net/EnRue/2020/06/22/breves-de-recherche-recherche-sous-enveloppe/

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Élodie Lambert-Barbot, « Témoignage d’une doctorante sur le processus de relance de Pratiques de formation/Analyses. Mes écritures « altern’hâtives » », Pratiques de formation/Analyses [En ligne], 66 | 2023, mis en ligne le 01 janvier 2023, consulté le 21 décembre 2024. URL : https://www.pratiquesdeformation.fr/167

Auteur

Élodie Lambert-Barbot

Doctorante en sciences de l’éducation à l'Université Paris 8, Experice, chargée de recherche à l’École nationale d’administration pénitentiaire